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Vol de l'Aigle : le 195e anniversaire de la Rencontre de Laffrey

Dimanche 7 mars 2010

Malgré des chutes de neige abondantes amorcées dès l’aube, ce dimanche 7 mars 2010 nous sommes présents pour commémorer le 195e anniversaire de la rencontre de Laffrey et pour honorer l’Empereur. Quand les premiers d’entre nous arrivent au Pré de la Rencontre, le site nous apparaît recouvert de neige et le ciel bas se confond avec la terre.

Un premier groupe se forme, rejoint par l’Union nationale des combattants, section Matheysine, avec notamment son président Claude Revol et son porte-drapeau, le capitaine Cherchi. En attendant le reste de notre groupe, nous posons sous la statue équestre de Napoléon puis nous montons l’escalier menant à lui, accompagnés par Jean-Jacques Aymes, du 9e cuirassiers.

Petit à petit, notre groupe se renforce et nous sommes rejoints par Madame Hélène Perrin, maire de Laffrey, et Monsieur Charles Galvin, conseiller général du canton de La Mure. Il y a aussi  les artistes peintres Martine Petiot et Jean-Claude Barnier. Chaque napoléonien arbore, à l’initiative de Ronald Zins, un bouquet de violettes en hommage à l’Empereur. Il offre un bouquet à Madame Hélène Perrin, touchée par cette attention et qui se protège de la neige avec un parapluie de couleur… violette. Enfin, Nicolas Hirsch, président du groupe de reconstitution « La brigade infernale » nous rejoint avec trois hussards du 5e régiment.

Ronald Zins fait les présentations, puis les reconstitueurs et le porte-drapeau de l’U.N.C. se mettent en place pour la cérémonie d’hommage. Ensuite, au son de Veillons au salut de l’Empire, le président dépose avec Madame Hélène Perrin une gerbe de fleurs devant la statue de l’Empereur. Il rappelle alors brièvement la raison de notre rassemblement au Pré de la rencontre et il clôture sa brève allocution par un « Vive l’Empereur » repris en chœur par tous les napoléoniens présents. Cette cérémonie achevée nous nous retrouvons à la mairie où Hélène Perrin nous offre le verre de l’amitié au nom de la municipalité de Laffrey. Là, tout le monde bien au chaud, Ronald Zins raconte l’événement qui a rendu Laffrey célèbre et en a fait un endroit mythique de l’Épopée :

« Le 7 mars 1815 au matin Napoléon marche en direction de Grenoble. Les chevau-légers polonais ouvrent la route, suivis des chasseurs de la vieille garde, puis de l’Empereur en calèche, son cheval mené en main. Le gros de la colonne, venant de Corps, n’a pas encore rejoint… Soudain, les chasseurs voient les lanciers polonais revenir à bride abattue et sautent aussitôt des charrettes qui les transportent, se rassemblent, chargent leurs armes. Napoléon descend de sa calèche, monte à cheval, dépasse les fantassins et pousse vers le nord avec les lanciers. Lorsqu’il parvient en vue de Laffrey il s’arrête et comprend la gravité de la situation. Une troupe d’infanterie est rangée en bataille en avant du village. Il s’agit d’un bataillon du 5e de ligne et d’une compagnie du génie, qui se sont repliés de La Mure dans la nuit. N’ayant pu détruire le pont de Ponthaux comme il en avait reçu l’ordre du général Marchand, le commandant Delessart a pris position à Laffrey pour arrêter la progression de Napoléon.

La situation est grave. Pour la première fois depuis Golfe-Juan des soldats français s’opposent à la colonne de l’Empereur. Un seul coup de feu, une seule goutte de sang répandue et le charme qui opère depuis le débarquement du 1er mars sera rompu. Chaque camp observe l’autre. Le commandant Delessart reconnaît Napoléon à sa redingote grise. Avec sa lunette il voit l’Empereur qui paraît très agité, se promène à grands pas sur la route, s’arrête puis observe le bataillon avec sa propre lunette. De nombreux paysans l’ont suivi et certains s’approchent même des soldats du 5e de ligne pour leur tendre des proclamations. Les soldats restent fixes à leurs rangs. Peu après un officier de la garde vient pour parlementer, mais Delessart, pourtant son ancien camarade, le renvoie, déterminé à s’opposer au passage de Napoléon.

Le capitaine d’artillerie Raoul, aide de camp de Napoléon, arrive alors à cheval et crie au bataillon : “ L’Empereur va marcher vers vous. Si vous faites feu, le premier coup de fusil sera pour lui. Vous en répondrez devant la France. “ Muets et immobiles les soldats ne bronchent pas. Cependant, les lanciers polonais s’ébranlent et derrière le peloton on aperçoit les longues capotes bleues et les bonnets à poil de la vieille garde. Un flottement se produit dans les rangs du 5e de ligne et Delessart lit l’épouvante sur le visage de ses hommes. Dans un premier réflexe il les fait reculer puis, retrouvant son sang-froid, il leur ordonne de reprendre leurs positions et de croiser les baïonnettes.

Alors, Napoléon ordonne au commandant Malet de faire mettre à ses hommes l’arme sous le bras gauche. A la tête de ses vieux chasseurs, portant l’arme basse, il s’avance vers le 5e de ligne. Le capitaine Randon, neveu du général Marchand, est arrivé peu avant près de Delessart et l’incite à ordonner de tirer. Delessart et ses soldats ne réagissent pas. Arrivé à une portée de pistolet d’eux, Napoléon leur dit : “ Soldats du 5e de ligne, reconnaissez-moi ! “ Puis, s’avançant encore de quelques pas et entrouvrant sa redingote grise : “ S’il est parmi vous un soldat qui veuille tuer son Empereur, il peut le faire : je viens m’offrir à vos coups ! “

Les soldats du 5e de ligne sont livides, leurs jambes vacillent, les fusils tremblent dans leurs mains crispées. Puis, soudain, un grand cri jaillit de leurs poitrines trop longtemps comprimées : “ Vive l’Empereur ! “ Les rangs sont rompus, les cocardes blanches jetées à terre, les shakos agités à la pointe des baïonnettes : le bataillon du 5e de ligne se rallie à Napoléon. Les soldats se précipitent vers lui, l’entourent, l’acclament et Delessart lui remet son épée tandis que Randon s’enfuit au galop. Napoléon saisit un soldat par la moustache et s’exclame : “ Aurais-tu bien eu le cœur de tuer ton Empereur ? “ Celui-ci fait sonner la baguette de son fusil pour montrer qu’il n’est pas chargé et répond : “ Tiens, regarde si j’aurais pu te faire beaucoup de mal ; tous les autres sont de même ! “ Et l’Aigle poursuit son vol vers les tours de Notre-Dame. »

Après son intervention, Madame Perrin évoque le projet de construction d’un musée à Laffrey. Ensuite, la conversation se poursuit à bâton rompu autour d’un sérieux apéritif. Vers onze heures, Madame Perrin, qui devait déjeuner avec nous, se voit contrainte de nous quitter pour une autre cérémonie. Nous nous rendons doucement au restaurant tout proche.

Rendus à l’hôtel du Parc, nous sommes attablés dans une salle coquette et évoquons les futures animations culturelles de l’année 2010. A midi, c’est l’heure de l’agape, copieuse et fine, qui se déroule dans une ambiance chaleureuse et s’achève passé quatorze heures. Repus et réchauffés, nous descendons la côte de Laffrey et nous rendons à Vizille au Musée de la Révolution française installé dans le château, ancienne demeure des ducs de Lesdiguières (XVIIe siècle), de la famille Perier (1782-1895) et des présidents de la République (1924-1972). C’est dans ce château que s’est réunie, le 21 juillet 1788, l’assemblée des trois ordres du Dauphiné, manifestation politique déterminante dans l’amorce des bouleversements de 1789.

Après une introduction historique au milieu des 3 tableaux de l’Assemblée de Vizille, de la Journée des Tuiles et du Serment du jeu de paume, munis d’audiophones, nous faisons une visite libre au gré de chacun. Nous nous croisons, nous interpellons pour évoquer une œuvre, montrer un tableau, une arme, une salle du château. La visite est passionnante et nous redécouvrons toute l’histoire de la Révolution de 1788 à 1799.

A 17 h 00, le musée ferme et c’est le moment des adieux. Quelques dernières photos, salutations et embrassades, puis nous nous séparons en nous donnant rendez-vous à Arnas et Saint-Georges de Reneins les 19 et 20 mars.